Et voilà, après 4 nuits, nous quittons notre petit coin tranquille, la petite rivière, les loutres, notre ami le héron et nos voisins russo-canadiens. L'enfant est content car il m'a dit la veille que ce camping n'était pas "cool" car il n'y avait "rien" : pas de jeux, pas de piscine, pas de boutique, pas de restaurant... Il n'y a "qu'une rivière" ce qui n'est pas très intéressant. Le filleul, lui, est plus sensible au charme rustique de la nature et serait bien resté plus longtemps.

Nous sommes tout au nord de la Californie, proche de l'Oregon mais le voyage touche à sa fin et nous redescendons vers le sud pour rejoindre San Francisco. Nous longeons de nouveau la côte jusqu'à la petite ville de Trinidad. C'est une jolie bourgade surplombant l'océan. On a vue sur une jolie crique très pittoresque avec des bateaux. Quand le paysage se recouvre partiellement de brume, il devient presque féerique et on se croirait dans une peinture romantique du XIXème siècle. La ville elle-même est pleine de fleurs. On dirait une retraite pour hippy et hipster. D'ailleurs nous mangeons dans un café qui sert de délicieux brunchs très branchés avec des fleurs comestibles dans des bols de fruits.

À Trinidad, nous disons au-revoir à l'océan qui nous a accompagné depuis notre départ. En effet, nous allons rejoindre San Francisco par l'intérieur des terres et roulons à présent vers l'est à travers les forêts. Après de longues heures de routes, nous arrivons à notre point de chute à Trinity, au bord du Trinity Lake.

Nous avons choisi un camping "cool" selon les critères de l'enfant. À Manchester, nous avons découvert les campings KOA : c'est une chaîne qui propose des campings un peu club vacances. En particulier, il y a toujours une piscine. Comme nous avons apprécié l'expérience, nous en avons repris un par la suite et celui-ci est notre 3ème. Cependant, je le trouve moins chaleureux que les deux derniers. Il est plus grand. Nous sommes installés dans la forêt. Nous sommes certes tranquilles mais aussi loin des sanitaires et loin de la piscine, des aires de jeux et de l'accueil.

Enfin bon, nous montons les tentes tandis que les enfants font des constructions avec des gros cailloux. Puis nous allons nous rafraîchir à la piscine. En effet, en quittant la côte, nous quittons la fraîcheur. Avant nous avions froid avec 15 degrés, à présent nous avons trop chaud avec 35. Le juste milieu est difficile à trouver.

Le soir, la chaleur s'estompe et on a même une réelle fraîcheur pendant la nuit. Au matin donc, il fait une température agréable. Nous décidons d'en profiter et de partir en balade.

Notre organisation de voyage est une espèce de chaos organisé. Nous choisissons nos étapes au fur et à mesure et savons finalement mal ce qu'il y a à voir là où nous sommes. Seb a trouvé une randonnée sur Open Street Map Ce matin mais nous ne savons pas vraiment à quoi nous attendre alors que nous roulons sur une piste poussiéreuse pendant 20 bonnes minutes.

Arrivés au départ de la balade, le premier objectif indiqué sur le panneau se situe à 5 miles, soit beaucoup trop loin pour nous avec les deux jeunes enfants. J'interpelle un couple qui semble repartir pour leur demander si le début de la randonnée est intéressant et s'il y a quelque chose à environ 1 mile. "Oui" me répondent-ils : le début de la balade suit une rivière et est très bien. En marchant un peu plus d' 1 mile, on peut atteindre un petit pont et descendre jusqu'à une petite plage. Parfait ! Voilà donc notre objectif.

Nous sommes prêts et nous nous engageons avec nos deux petits garçons. Le chemin est très agréable. Nous marchons à l'ombre dans la forêt et il ne fait pas encore trop chaud. En contre bas, coule le joli torrent. Il y a un léger dénivelé mais ça reste très raisonnable. L'enfant râle évidemment un peu de temps en temps mais il est de bonne humeur. Comme c'est le matin, il n'est pas trop fatigué et marche sans être trop pénible même s'il demande parfois à quelle heure on arrive et veut sans arrêt faire des pauses et se faire prendre en photo. Le fait d'avoir un objectif facilite les choses et nous évite de faire demi-tour à la moindre difficulté.

Ainsi, nous atteignons le fameux pont où l'on peut en effet descendre au bord du torrent. Nous avons pris nos maillots et nous trempons dans l'eau. Cependant c'est une eau glacée de montagne et on peut difficilement s'y baigner plus de quelques secondes. Il est midi et il aurait été idéal d'avoir un pique-nique. Mais nous n'en avons pas car nos provisions sont un peu à sec ! On se contente donc de s'hydrater et de manger quelques biscuits et barres de céréales.

Les enfants jouent et nous prolongeons la pause mais il faut tout de même penser à repartir. Le retour devrait être plus simple car on descend mais les enfants risquent d'être fatigués. Pour les occuper, je leur apprends des chansons D'abord "Un éléphant qui se baladait" mais surtout la chanson de colonie "la si la sol" où l'on peut inventer des paroles ce qui les amuse beaucoup et les occupe quasiment tout le trajet. Bientôt, nous voilà de retour à la voiture après avoir parcouru plus de 4km ce qui, pour un enfant de 4 ans, est une belle randonnée. D'ailleurs l'enfant s'endort dans la voiture sur le chemin du retour.

Nous déjeunons tardivement au seul restaurant de Trinity : le Yellow Jacket. C'est un endroit agréable, tenue une grande femme blonde très énergique et sympathique, avec une terrasse extérieure ombragée. Le menu est simple (salades, sandwichs, burgers) mais bon. Malheureusement ce midi, pas de frites pour nous car elle n'a pas été livrée et pas de milkshakes non plus car elle n'a plus de glace. Mais notre repas reste très agréable. Dans un coin de table, le restaurant met à disposition quelques jeux de société qui amusent les enfants.

En face du restaurant, il y a une sorte d'épicerie mais le choix est bien maigre. Nous sommes à court de provisions. Par ailleurs, nous ne nous sommes pas occupés de mettre nos pains de glace au frais et donc notre glacière n'est pas très utile, surtout avec la chaleur actuelle. Finalement, on décide pour ce soir de commander un poulet rôti au Yellow Jacket qui propose ce service.

En attendant, nous faisons le tour de la minuscule ville en voiture. D'abord, nous roulons jusqu'au lac. J'avais l'idée qu'on y trouverait peut-être une plage mais il n'y a qu'un parking avec une rampe à bateaux. C'est un lac artificiel : une retenue d'eau créée par un barrage. Les bords du lac manquent cruellement de charme. La forêt s'arrête brusquement et se transforme en pente poussiéreuse et décharnée qui descend dans l'eau. Ça ne fait pas très envie. Et idée d' une balade en bateau n'est pas très attrayante non plus : le lac ne m'inspire pas la fraîcheur mais me semble être au contraire un immense miroir brûlant sous le soleil imperturbable de l'après-midi. Le reste de la ville est constitué de maisons individuelles posées le long des quelques rues quadrillées. Il y a plus de drapeaux américains que d'habitants visibles. Une seule incongruité : ce "musée historique" qui s'enorgueillit d'une "collection de barbelés".

Les heures restantes de notre après-midi sont donc passées au camping, aux jeux d'abord puis à la piscine. Puis nous retournons chercher le poulet rôti au restaurant et dînons tranquillement à notre tente.

Comme la balade a été un succès, nous voulons recommencer le lendemain. Mais nous sommes moins ambitieux. Grâce à un guide trouvé au camping, nous avons découvert une autre balade, proche de celle de la veille, où l'on peut atteindre un petit lac après seulement quelques 800 mètres.

Un peu fatigués ce matin, nous sommes moins rapides que la veille. Nous préparons aussi de quoi faire un pique-nique avec les restes du poulet. Puis nous revoilà sur cette route poussiéreuse pour rejoindre cette nouvelle balade.

Elle est certe plus courte que la veille mais elle est aussi moins agréable. Le dénivelé est plus abrupt. Il y a moins d'ombre. Nous sommes tous plus fatigués et en particulier l'enfant. Il n'avance que parce qu'on lui répète que l'objectif est proche et il se plaint beaucoup. Il me dit "pourquoi on fait que les balades les plus difficiles !" "Regarde maman, il y a des gros cailloux devant moi, ils sont trop gros ! Je peux pas avancer !". Nous arrivons cependant rapidement au lac. C'est plutôt un bel étang sauvage, entouré de grands arbres et de hautes herbes et couvert de nénuphars. Là nous pique-niquons tranquillement (même si j'ai oublié le fromage dans la voiture) et repartons.

Quand nous revenons à Trinity, l'enfant s'est endormi. Avec le filleul, je m'installe à la terrasse du Yellow Jacket avec un milkshake avant d'entamer un jeu qui ressemble aux petits cheveux. Plus tard, nous retournons comme la veille à la piscine puis revenons au restaurant pour notre dîner (le Yellow Jacket est à peu près la seule source de nourriture dans cette ville). Alors que nous venons de commander et de payer, la ville subit une coupure d'électricité générale. Heureusement, les serveuses et la patronne arrivent tout de même à se débrouiller et nous avons notre repas ! C'était notre dernière soirée à Trinity, le lendemain on espère être moins isolés.