Le départ de Nara n'est pas de tout repos. Le plan était de reprendre le train jusqu'à Kyoto et de louer une voiture à la gare. Mais le loueur de voiture que nous avons trouvé par internet n'est pas du tout à côté de la gare centrale. Il faut descendre en banlieue et ensuite se débrouiller pour trouver l'endroit. Moments mémorables dans le taxi quand nous donnons les indications foireuses de notre GPS au chauffeur japonais : "left-u left-u go go hay hay, se-tu-rai-te hay hay" (se-tu-rai-te = straight, tout droit en japanenglish). Perdus au milieu d'une zone industrielle, je me décide à appeler l'agence de location avec mon téléphone portable, on me répond en japonais et je dis quelque chose du genre : "we rent a car today, please explain the taxi", puis je tends mon téléphone. Je ne peux qu'imaginer ce que le chauffeur interloqué a alors dit : "Bonjour, j'ai deux "gaijin" (étraingers) à l'arrière mais je ne comprends rien à ce qu'ils veulent". Quand il raccroche après 5 minutes d'échanges en japonais, il semble savoir où aller ! Et très vite, c’est la victoire, nous arrivons à l'agence. Nous récupérons la voiture et quittons Kyoto, direction le nord du Kansaï.

Nous nous arrêtons pour manger sur une petite place avec une fontaine dans laquelle s'amusent des enfants, puis roulons les quelques deux heures qui nous séparent de la côte. Et d'un seul coup, la mer apparait comme par miracle derrière les montagnes. La ville d'Amano Hashidate est divisée en deux parties des deux cotés d'une petite baie. On passe d'un bout à l'autre par une digue naturelle plantée de pins et longée de plage. L'office du tourisme nous a trouvé un petit hôtel cheap. La chambre est d'un confort sommaire mais peu importe : nous pouvons marcher jusqu'à la plage et c'est la première chose que nous faisons. C'est la fin de l'après-midi, la journée de baignade est terminée pour les japonais. Nous sommes donc seuls, le soleil est déjà légèrement caché derrière les arbres et il souffle une agréable brise. L'eau est d'une température exquise, nous nous délectons après cette journée de route. Nous nous séchons en regardant le coucher de soleil dans les montagnes derrière la baie.

Plus tard, nous retournons à la plage pour y prendre notre dîner. Le Japon est un pays qui se couche tôt. Il n'est pas encore 20h et déjà, il fait nuit noire et la petite ville semble endormie. Nous sommes seuls sous le lampadaire, les pieds dans le sable. Mais que font les japonais alors ? Ils sont aux bains ! Quoi de mieux avant de se coucher que de se détendre dans l'eau chaude d'un onsen. Dans notre hôtel, non seulement nous n'avons pas de salle de bain dans la chambre, mais en fait, il n'y a pas vraiment de salle de bain tout court. Pour compenser, on nous donne des coupons pour profiter de l'onsen du très chic hôtel voisin. Un grand bassin intérieur, un autre extérieur avec vue sur la mer, on peut se prélasser avec volupté. Nous avons le droit à une baignade le soir et une autre le matin et nous en profitons pleinement.

Et nous revoilà sur la route, longeant la jolie côte nord du Kansaï. Nous parcourons la très jolie péninsule "Tango Hanto". Le village d'Ine étend ses petites maisons de bois entre la montagne et la mer. Elles ont les pieds dans l'eau, montées sur pilotis, et les bateaux de pécheur viennent d'y réfugier. Au bout de la péninsule, nous nous arrêtons un moment pour faire une promenade jusqu'au phare. Le guide disait "la balade commence derrière le grand parking avec le restaurant", mais en guise de restaurant nous trouvons une vieille bicoque tout à fait fermée.  On se contentera ce midi de madeleines et de quelques tranches de fromage.

Enfin, nous laissons derrière nous la péninsule et continuons jusqu'au village de Takeno. Il y flotte une certaine sensation de bout du monde. Lieu de villégiature local, petit village de pécheurs qui offre simplement sa jolie plage dorée et attire ainsi quelques touristes perdus. La jeune femme du petit bureau touristique ne parle pas un mot d'anglais mais nous conduit à pied à l'auberge familiale qui nous loge : un ryokan assez simple tenu par un vieux couple et certains autres membres de la famille (difficile de savoir qui est client et qui vit ici). La vieille dame toute petite marche en boitant de ses jambes tordues et j'ai l'impression qu'elle n'arrivera jamais en haut de l'escalier. L'homme, lui, semble sorti d'un film de Miike avec son visage ridé, ses lunettes de soleil et son grand chapeau de paille. Il boîte lui aussi et passe son temps assis dans le petit salon au rez de chaussée. Devant la porte, des robinets pour se rincer les pieds, la plage est juste de l'autre côté de la rue. Nous nous y baignons comme la veille à l'heure où tout le monde s'en va : les glaciers ferment et familles disparaissent.  Le soir, nous mangeons dans une petite cafétéria pour les quelques touristes. On y sert des plats japonais et quelques trucs plutôt américain. Comme depuis un certain temps maintenant, il n'y a pas de menu en anglais  mais mes capacités en débrouillardises sont à présent très développées : j'arrive à commander de la tempura en demandant qu'on ne me mettre que des légumes et pas des fruits de mer.

Le lendemain, nous repartons vers Kyoto, mais avant, nous nous arrêtons à Kinosaki. C'est une jolie petite ville dans la montagne à quelques kilomètres de Takeno. Une petite rivière coule entre des saules pleureurs et les touristes se promènent d'onsen en onsen. En effet, la principale activité de la ville consiste à se baigner encore et encore, toute la journée. Nous n'avons le temps de ne tester qu'un seul établissement. A l'arrière d'un joli bâtiment en bois avec son étang et ses nénuphars, on se baigne à côté d'une petite chute d'eau dans l'eau brûlante. C'est notre dernier onsen, le départ approche...