La neige tombe encore vendredi matin, elle n'a pas vraiment cessé depuis la veille. On se couvre de pulls, écharpes, bonnets, gants, etc. Et on marche vers le cinéma en évitant de tremper ses bottes dans les flaques boueuses de neige fondue (peine perdue).

Notre premier film nous vient d'Estonie, The Man in the orange jacket a été fait presque sans moyens, de l'aveu même de son réalisateur. Il s'en sort de façons tout à fait honorable à mon humble avis. Au départ, le scénario parait assez classique : l'attaque d'un riche couple dans leur luxueuse maison. Mais tout semble bouclé après 10 minutes de film et s'ouvre alors un développement beaucoup plus expérimental sur la solitude, la paranoïa, la folie… Le film est certes assez lent, ce qui aura laissé quelques festivaliers sur le carreau. Mais personnellement, j'ai trouvé l'idée originale et le traitement efficace.

Déjeuner à la Géromoise tandis que les gros flocons continuent de tout recouvrir. Entre deux films, on ira enfiler les « chaussettes de voitures spéciales neige » pour que la Micra puisse monter ce soir la petite côte qui mène au chalet. Notre après-midi est longue : 5 séances entre 14h30 et 2h du matin. On commence avec un film néerlandais hors compétition, The Pool. J'avais un peu peur mais c'est plutôt une bonne surprise. Le scénario n'est pas très original : une famille part en camping dans la forêt et les choses ne tournent pas très bien. Pas de grands effets, pas de sursauts toutes les deux minutes. On se prend au jeu, à cette famille qui se délite petit à petit tandis que l'inquiétude monte. Je sors de la salle plutôt satisfaite.

On enchaîne sur la suite de la compétition : Jamie Marks is Dead. Comme beaucoup des films que j'ai vus jusqu'à présent, il est correct sans être excellent. Un jeune adolescent est traumatisé par la mort d'un de ses camarades. De là se suit une amitié post-mortem, une réflexion sur la culpabilité, la solitude, le choix de la vie ou de la mort. C'est touchant, plutôt bien joué, mais ça tourne un peu en rond et ça manque d'une cohérence, d'un rythme qui ferait vraiment apprécier le film.

Heureusement, arrive pour nous la vraie trouvaille de cette compétition. En début de soirée, nous assistons à la séance du dernier film en compétition de la journée : The Voices de Marjane Satrapi. Je connaissais la dessinatrice-réalisatrice pour sa description sociale piquée d'humour de l'Iran dans Persepolis. La voilà qui sort du cinéma d'animation et rejoint le film de genre : je me demandais ce qu'on allait découvrir. Je n'ai pas été déçue! The Voices est un petit bijou d'humour noir et déjanté : comment décrire un psychopathe fleur bleu en suivant sa descente en enfer vers des crimes de plus en plus sordides à coup de chansons roses bonbons et petits papillons. Cruauté, têtes coupées et humour décalé, le film a su séduire les festivaliers. Il est applaudi à grand bruit, deux fois : au moment de l'apparition du générique (comme d'habitude) et encore une fois à la fin de celui-ci car la chanson de fin sonne comme un bouquet final, une cerise sur le gâteau, délicieusement noire et sucrée ! Je reste sur ces derniers mots : « Come on sing along, sing a happy song ! ».

Le film suivant est aussi très amusant mais de façon beaucoup moins voulue… Ouija est un film d'horreur pour ado tellement mauvais et cliché qu'il en devient drôle. C'est simple, j'ai l'impression de voir un faux film, une parodie où tout est téléphoné, attendu, ridicule. Les actrices ressemblent à des poupées sorties tout droit de magasines imbéciles. Leur moindre expression est prévisible. Je ne m'ennuie pas en regardant le film, je le trouve drôle : le scénario est vu et revu, sans aucune subtilité, chaque scène est une caricature. Le problème, c'est que c'est du premier degré… Ces personnages lisses et ces décors en papier glacés ne représentent rien d'autre que le vide d'un film sans ambition et raté.

Pourquoi sommes-nous rester regarder Ouija ? Car, pour être honnête, on savait très bien que ce serait mauvais. Simplement, entre 22h et minuit, à part marcher sous la neige qui n'arrête pas de tomber, il n'y a pas grand-chose à faire à l'espace Lac ! Et à minuit, commençait le film qu'on voulait voir : What we do in shadows. Et on n'a pas regretté d'avoir veillé si tard ! Le film se présente comme un documentaire sur une collocation de vampires en Nouvelle -Zélande. Il reprend à son compte, et détourne gentiment, tous les clichés des émissions de pseudo-télé-réalité. L'effet est hilarant, les scènes cultes se suivent. Il faut dire qu'un des réalisateurs et acteurs du film est Jermaine Clement, membre du duo culte « The Flights of the Conchords ». J'avais peur que l'effet s'essouffle après quelques scènes, mais non, le film se tient du début à la fin, humour absurde et décalé, confession de vampires façon Loft Story.

C'est là dessus qu'on termine notre journée. Quand on ferme les yeux pour s'endormir, on ne voit ni sang, ni vampire, mais des flocons qui tombent, qui tombent, qui tombent !