Je suis un peu en retard ce trimestre pour le challenge 1000 ans de littérature française proposé par Bookine et ma lecture des Lettres Persanes de Montesquieu.

Si j'ai mis un peu de temps à terminer le livre, la lecture n'en a pas été désagréable. Le découpage en lettres, comme de petits chapitres, rend la chose tout à fait faisable et plaisante. Assez vite, on identifie les différents personnages et les intrigues qui se jouent. A travers ses fictifs persans, Montesquieu décrit la société française avec beaucoup d'humour et d'acidité. Certaines caricatures sont encore d'actualité, d'autres demandent une connaissance plus aiguës du XVIIIème siècle et je remercie pour cela les notes de bas de page !  Cependant, les réflexions sur la religion et la philosophie en général sont tout à fait compréhensibles et intéressantes. Comme il fait parler des persans, Montesquieu se permet des critiques acerbes et avance des idées qui, encore maintenant, doivent parfois déranger.

Mais je dois dire que mes lettres préférées n'ont pas été celles du froid Usbek ni même de son acolyte plus sympathique, Rica, mais bien toutes celles relatant les aventures du harem laissé en perse. Les femmes du sérail écrivent à leur mari de longues lettres passionnées et des intrigues compliquées semblent se nouer. J'ai trouvé amusant ce point de vue féminin, cette expression du désir et de la volupté. Le personnage d'Usbek est poussé par là dans les limites de son système et de ses valeurs. Cachées sous leurs voiles, les femmes perses ne sont, au final, pas plus vertueuses que les européennes déjantées. Montesquieu choisit de finir par le dénouement tragique des intrigues du harem avec le suicide de la belle Roxane et sa lettre d'adieu. Mais plus que l'aveu du femme infidèle, c'est une ode à la liberté : ce que dit Roxane, c'est que Usbek par la force et l'emprisonnement n'a pu obtenir d'elle que l'apparence de l'amour et de la fidélité tandis qu'elle a toujours conçu contre lui une haine sans bornes et que les murs ne l'ont pas empêchée de voir son amant. Ne doit-on pas voir là une image de ce qu'est la tyrannie et le pouvoir absolu qui, s'il peut contenir les hommes n'enferme pas les esprits ?