En avril, 6 films !

Santiago 73, Post Mortem de Pablo Larrain

Un film étrange, glacial et cruel. Nous voilà dans le Chili de 1973, où Salvador Alliende est renversé par l'armée. Mais ici, nous ne voyons pas de scènes de révolutions, uniquement des rues vides et froides et des corps qui s'entassent. Le personnage principal travaille à la morgue où il rédige les rapports d'autopsie sous la dictée du médecin légiste, morgue bientôt envahie par les cadavres victimes du putsch. Il ne nous inspire pas de sympathie, seulement de la pitié dans sa solitude terne marquée par sa passion pour sa voisine, une danseuse sur le déclin. Un film dénué d'humanité et qui peut déranger,  avec des scènes fortes mais il lui manque quelque chose, un rythme, un battement de cœur.

Tous les soleils de Philippe Claudel

Ce film me laisse perplexe. Je ne peux pas nier qu'il ait énormément de défauts, les acteurs ne jouent pas toujours bien, il y a des problèmes de montage, on dirait presque un mauvais téléfilm par moment ! Mais il est emprunt d'une telle bonne humeur que malgré ses défauts (et la conscience que j'en avais alors même que je le regardais), je l'ai assez apprécié. Il a grand avantage, qui est assez rare chez les films moyens,  qu'il devient meilleur en avançant. Ce qui ne semblait qu'une farce prend un peu de profondeur, certains personnages caricaturaux du début deviennent loufoques et agréables. A la fin, on est sincèrement ému et la musique et le soleil qui nous bercent n'y sont pas pour rien.

Tomboy de Céline Sciamma

Je me souviens de la bande annonce du film, je vois des enfants qui jouent, un petit garçon qui s'amuse, je me dis que c’est bien filmé mais je me demande un peu de quoi peut bien parler le film, et puis la phrase de la mère : "Mais pourquoi tu as dit à tout le monde que tu étais un garçon ?". L'actrice a 10 ans, elle s'est coupé les cheveux pour le film. La réalisatrice a su saisir cette fragilité, ce questionnement à l'age où la différenciation des sexes n'existe que dans le regard que l'on porte. Les enfants ont un jeu très naturel, ce ce sont pas les poupées habituelles des publicités, ce sont de vrais petits gamins avec leurs têtes et leur corps parfois un peu mal foutus, à la frontière avec l’adolescence. Il est incroyable d'avoir réussi à saisir une telle spontanéité sans tomber dans le descriptif, en gardant une tension toute cinématographique. La petite sœur en particulier est incroyable de justesse dans sa féminité de petite fille, dans son sentiment ambivalent face à cette sœur qui joue les grands frères. Beaucoup de tendresse dans ce film, et beaucoup de sensibilité, la découverte du mois, voire de l'année !

Source Code de Duncan Jones

J'avais vu le premier film du réalisateur, Moon, à Gerardmer, petit bijoux de science fiction. Ce film-ci reste beaucoup plus formaté pour répondre aux exigences des grosses productions. Mais il garde tout de même un certain charme étrange et un scénario bien ficelé. L'acteur principal fait beaucoup pour la réussite du film et malgré une fin un peu décevante et des explications tordues, on prend plaisir à le voir.

Ha ha ha de Hong Sang Soo

Deux amis se retrouvent après un séjour dans leur ville natale, ils y ont été en même temps mais ne ce sont pas rencontrés. Ils se racontent chacun leur voyage, et le spectateur découvre alors qu'ils ont en fait passé leur temps à se croiser et à voir les mêmes personnes, mais eux même n'en savent rien. Nous sommes donc les seuls à avoir l'histoire au complet, passant d'un récit à l'autre, connectant les fils. Bien sûr, c'est un exercice qui peut se révéler fastidieux et certains n'ont peut-être tout simplement rien compris ! Mais une fois, le trouble passé, le jeu est amusant, les personnages se croisant et s'évitant, le spectateur comme une petite souris se glissant derrière le mur. Rien de bien profond, juste un effet un peu envoutant, comme un léger tourbillon...

Le Mépris de Jean-Luc Godard

Et pour finir mon mois de cinéma, je vais voir Le Mépris, diffusé à la ferme lors d'une soirée spéciale. Ça me permet de découvrir ce réalisateur culte qu'est Godard et que je connais très mal. Le film nous est présenté, ce qui me permet de faire un rattrapage express sur les théories de Godard et de la nouvelle vague (ça reste tout de même encore assez flou). J'ai surtout apprécié le ton assez étrange qu'utilise le conférencier pour parler de Godard, il rend hommage à son talent tout en nous donnant l'image d'un personnage très particulier et plutôt antipathique !  Le film en lui même est intéressant, des longs plans ensoleillés sur des personnages victimes de ce qu'ils sont mais incapables d'aller contre. Brigite Bardot n'est pas qu'une simple poupée, bien qu'elle ne joue que ce qu'elle est (visiblement, c'est ce que  cherchait Godard), elle semble frappée par le mépris qu'elle ressent comme d'une maladie désagréable mais qu'elle accepte à contre cœur. Et puis, il y a tout ce truc du film dans le film et ces plans figés de statues grecques un peu effrayantes. Un film troublant, et que je suis contente d'avoir vu.