Mercredi, journée chargée, nous partons en expédition. Nous avons loué avec d'autres français un 4x4 avec son chauffeur / guide et nous voilà dès 7h sur la route. Premier arrêt au sud de l'île pour voir des ruines phéniciennes puis nous rejoignons le continent par la voie romaine de 7km à travers la mer.

Nous traversons les champs d'oliviers plantés dans la terre rouge. Le paysage est assez semblable à celui de l'île. Puis nous découvrons avec étonnement le lac salé. Le sel s'étend sur plusieurs kilomètres carrés en une longue nappe blanche. Il crisse sous les pieds comme du givre, sa surface est lisse et légèrement craquelée comme de la glace. La rive se dessine clairement, frontière minérale entre le sel blanc et le sable rouge. Nous reprenons la route et descendons vers le sud. Plus nous avançons et plus les oliviers rétrécissent jusqu'à ne devenir que de minuscules buissons. Puis, il n'y a plus d'oliviers mais une terre desséchée et parsemée d'herbes éparses. Nous voyons même un prémisse du désert de sable qui s'étend plus au sud : une grande étendue de dunes au sommet desquels poussent de longues tiges noires ce qui leur donne un aspect étrange et monstrueux. Puis revient le désert de cailloux. Nous croisons quelques troupeaux de chèvres et moutons gardés par de jeunes garçons ou par des femmes. Les femmes enturbannées dans leurs voiles colorés marchent aux abords de la route et semblent cueillir les longues herbes qui poussent par endroit, elles les portent en botte sur leur dos.

Nous entrons dans la ville de Tataouine, porte du sud et du désert. On sent ici qu'on s'enfonce plus profondément dans le continent africain. Il y a moins de gens en vêtements occidentaux et plus de djellabas, d'hommes à la peau sombre et brulée dont le visage est enroulé dans des foulards pour se protéger du soleil. La ville est empreinte d'une beauté intrigante sous le ciel bleu éblouissant  ses rues  blanches et  poussiéreuses. C'est à Tataouine qu'étaient installés les bataillons d'Afriques, bagnes militaires aux rudes conditions de détention. Le nom même de la ville évoque un lieu lointain et infernal. On comprend, en effet, que la vie dans ce climat extrême, desséché, brulant l'été et balayé par les vents puissent être un enfer ! Du bagne, il ne reste aujourd'hui qu'un fort perché au sommet d'une colline et qu'on ne peut visiter.

Un peu de douceur, la ville est réputée pour ses cornes de gazelles et notre chauffeur nous dépose devant une pâtisserie. Il doit y avoir des accords entre les pâtissiers et les chauffeurs car un car de touristes a aussi été débarqué ici. Un jeune homme nous entraine à l'intérieur pour nous montrer la préparation et, à mon grand bonheur, nous faire gouter. Enfin, la visite se termine par la vente de grandes boites pleine de ces gâteaux que nous pouvons conserver jusqu'à notre départ. Nous nous rendons ensuite au souk. Je ne suis pas très forte en négoce mais arrive à acheter des épices à un prix qui me semble raisonnable. Les vendeurs nous alpaguent, mais ce n'est pas trop agressif. On peut discuter avec eux du pays et de la situation actuelle où les touristes sont moins nombreux. Ils connaissent tous des gens en France et beaucoup y sont déjà allé. Si Sébastien n'est pas à côté de moi, je deviens une gazelle sans son gazou et me fait encore plus appelée de tout côté avec des compliments glissés un peu partout pour me convaincre de venir regarder la marchandise. Un vendeur propose en blaguant de m'acheter contre des chameaux à ma mère mais son offre est généreuse : tous les chameaux d'Afrique. Le souk n'est pas très grand mais on arrive tout de même à se perdre de vue et à chercher son chemin.. Nous traversons le marché au légumes, on sent qu'on n'est plus dans la zone de vente pour les touristes car ici, personnes ne nous appelle. Enfin, nous retrouvons rapidement le groupe et le chauffeur et quittons la belle Tataouine.

Nous allons encore un peu au sud où le paysage, si plat jusqu'alors, commence à se vallonner. La route est en très bon état et le 4x4 file à toute allure, bondissant sur  les talus, on se croirait dans des montagnes russes. Les collines de cailloux rouges et desséchées se dessinent sur le ciel bleu. Nous nous arrêtons pour visiter un village berbère perché au sommet de l'une d'elle. C'est un habitant qui, avec sa belle carte de guide, nous fait visiter. Nous découvrons les fameuses habitations troglodytes : elles sont taillées dans la roches mêmes ce qui les rends fraiche l'été et chaude l'hiver. Le village est absolument magnifique, nous montons la colline et découvrons la vue au fur et à mesure. Bien que l'on soit au plus chaud de la journée, un agréable vent rafraichi l'air et je n'ai pas de difficultés à grimper. La petite mosquée blanche se détache parmi les petites constructions ocres qui se mêlent à la colline elle-même. Un chemin praticable a été aménagé pour les touristes qui doivent être nombreux à la haute saison. Le petit village a bien du mal à survire de façon "authentique", bientôt il ne sera plus qu'une image d'un temps révolu. En attendant, quelques habitants s'accrochent et n'ont pas la vie facile : le tourisme leur donne les moyens de rester vivre ici. Il est amusant de constater qu'ils ont l'électricité ainsi que des paraboles qui leur permettent d'avoir des téléphones portable mais que l'eau courante n'est pas encore à l'ordre du jour,  le progrès va comme il peut.

En bas du village, un grand restaurant touristique s'est installé et c'est là que nous mangeons un couscous bien agréable, et en dessert, les fameuses cornes de gazelles. Puis nous reprenons la route : nous remontons vers le nord mais visitons au passage les "ksour". Au sommet du village berbère, le guide nous avait montré le grenier ou "ksar" qui sert à conserver les aliments comme les farines ou les huiles. On en trouve aussi dans la plaine, qui étaient surtout utilisés par les nomades et sont maintenant presque tous abandonnés. Ce sont des petites constructions rondes qui s'empilent les unes sur les autres avec des systèmes de poulies ou d'escaliers très peu praticables pour accéder aux étages supérieurs. L'un deux a été rénové pour être transformé en hôtel avant d'être abandonné puis repéré par George Lucas pour son film "La Menace fantôme" ! Nous terminons par le ksar de Medenine où se sont installés des vendeurs. Ils sont plus racoleurs que ce que nous avions vu jusqu'ici et nous appelle sans cesse. Comme j'achète une tunique à l'un d'eux, ils sont jaloux et veulent tous que je vienne visiter leur boutique : j'ai bien du mal à m'enfuir.

Nous retournons à Djerba par le bac et profitons du doux soleil de l'après midi alors que nous filons sur l'eau bleue. Et nous voilà de retour chez nous après cette belle excursion, avides de sommeil et de repos avant de continuer notre voyage...