Nous quittons Tokyo le lundi matin. Nous nous rendons d’abord avec tous nos bagages à la station de Shinagawa où nous trouvons, relativement facilement, le loueur de voitures chez qui nous avons réservé. Tout se passe très vite et nous voilà, lâchés dans les rues de Tokyo. Le GPS est en Japonais mais une petite notice explique comment régler les instructions en anglais et comment définir la destination à l’aide des numéros de téléphone. C’est ainsi que nous arrivons à sortir de la ville, en suivant aveuglément le GPS à travers les voies rapides et les grattes ciels. Nous sommes sur la bonne autoroute, roulant vers l’ouest, et petit à petit, les grands immeubles laissent la place à la campagne.

Nous prenons la direction du sud vers la péninsule d’Izu Hanto. L’océan apparaît soudain devant nous et la voie rapide se transforme en petite route longeant le littoral. Nous voici à Atami, première ville de la péninsule. On y retrouve l’ambiance d’une station balnéaire avec sa jolie plage et son petit port. Le soleil brille et les familles se prélassent sur le sable. Très accessible depuis Tokyo, elle doit être prise d’assaut le week-end. Nous mangeons dans un grand snack bar avec vue sur la mer avant de repartir.

La route est agréable, entre mer et montagne, de jolis panoramas apparaissent à chaque circonvolution. Il est un peu plus de 16h quand nous arrivons à Kawazu petite ville au sud de la péninsule dans laquelle nous souhaitons passer la nuit. Il n’est pas aussi évident d’arriver à l’improviste, sans réservation, au Japon que ça pouvait l’être en Corée par exemple. Le principal mode d’hébergement sont les auberges traditionnelles : les ryokan et les minshugu. Tenus par des particuliers, ce sont des sortes de B&B japonais. Mais il faudrait déjà savoir les reconnaître et ensuite, ils n’apprécient pas forcément les visiteurs non annoncés (sans compter que peu parlent l’anglais). La solution : se rendre à l’office de tourisme. Là bas, tant bien que mal, on arrive à se faire comprendre et à réserver une chambre à ce qui nous semble être un prix correct. On suit ensuite le petit plan, quittant un peu la côte pour s’avancer dans la montagne.

Notre minshugu se situe le long d’une magnifique route au milieu de la forêt le long d’une gorge. On nous y accueille chaleureusement. Comme dans beaucoup de lieux japonais, on enlève ses chaussures à l’entrée de l’auberge. Puis on nous amène à notre chambre : pas de lit, le sol est recouvert de tatamis (nattes en bambous) et dans le placard on trouvera les futons qui nous serviront de matelas. On nous a donné un petit sac chacun avec un drap et plusieurs serviette ainsi qu’un kimono pour porter à l’intérieur de l’auberge. Celui qui m’a été donné est taillé pour les japonaises, c’est à dire qu’il est beaucoup trop petit pour moi. J’ai l’air tellement à l’étroit dedans que, dès qu’elle me verra le porter, l’hôtesse m’en proposera un de la taille au dessus qui lui s’avérera très confortable.

Nous n’avons pas de salle de bain dans la chambre et il n’y a pas non plus de salle de bain commune comme on les connaît en Europe. Il y a des bains, les fameux « onsens ». Derrière un rideau rouge pour les femmes, bleu pour les hommes, une première pièce avec casiers pour se changer. Puis on entre dans la salle avec les bassins : un bassin intérieur et un extérieur aussi bien chez les hommes que chez les femmes, plus un sauna chacun. On ne se baigne pas directement, d’abord on se lave avec les douches disposées autour des bassins qui proposent aussi savon et shampoing. Mais attention pour les pudiques : on se douche et on se baigne nue devant les autres femmes. A vrai dire, les deux fois où je me rendrai dans le petit onsen de l’auberge, je serai toujours seule et aurai donc une salle de bain géante uniquement pour moi !

Après avoir goûté aux plaisirs du bain, nous nous rendons, habillés de nos kimonos, au dîner servi à 18h. J’ai réussi à expliquer un peu plus tôt que je ne mangeais ni poisson, ni fruits de mer grâce à ma phrase apprise par coeur en japonais : «watachi wa sakana to shifudo arerugi desu». Ca a bien fonctionné, même si j’ai quand même un soufflé aux crustacés, mais au moins, l’hôtesse me prévient ! Par ailleurs, je ne manque pas de nourriture : on nous sert plein de petits plats, petites soupes, salades, légumes avec du riz à volonté et du thé vert. Le minshugu semble tenu par deux femmes, l’une, plus agée est peut-être la mère de l’autre. La plus jeune se promène partout avec sur son dos un bébé placide qui accepte sans sa situation sans se plaindre, véritable gardien zen de ce lieu qui s’appelle d’ailleurs « zen » quelque chose.  Il est très tôt par rapport à nos habitudes tokyoites quand nous remontons dans notre chambre pour finir la soirée à lire tranquillement sur les tatamis. Mais comme demain, le petit déjeuner sera servi à 7h30 autant essayer de prendre un rythme moins couche tard.

Le lendemain matin, je vais avec un peu de crainte au petit déjeuner. La nourriture est assez proche de celle du dîner avec cependant plus de fruits et du poisson grillé pour Sébastien ! Un pays assez vicieux pour servir d poisson au petit-déjeuner n’est certainement pas fait pour moi sur le long terme. Mais je ne me plains pas car tout est très copieux et on m’a remplacé le poisson par une soupe de pois assez épaisses. Pour ceux qui ne supportent que le café-croissant, il faut faire un peu d’efforts. Mais ayant déjà un peu voyagé, je suis habituée à manger des choses étranges le matin : du riz et de la soupe, pourquoi pas ?

Nous profitons encore un peu des bains et reprenons un peu de sommeil sur nos futons avant de partir. Nous allons encore vers le sud pour rejoindre la ville toute proche de Shimoda. La route entre Kawazu et Shimoda est magnifique. Nous sommes retournés sur la côte et longeons la mer le long d’abruptes falaises. Ce sont des paysages qui sont assez rares au Japon qui n’est pas réputé pour son front de mer. La route descend ensuite et nous arrivons sur une plage. Nous nous arrêtons là pour profiter d’une baignade dans le pacifique. De jolies vagues viennent mourir sur une côte rocailleuse mais il est difficile d’en profiter car, justement, il y a trop de rochers et on s’érafle les pieds et les genoux. Il faut nous rabattre sur la petite baie artificielle protégée de l’océan par une digue : il y a moins de rochers, mais aussi moins de vague. Mais la baignade reste un moment délicieux et le lieu est si joli qu’il fait oublier les quelques inconvénients.

Arrivés à Shimoda, pointe sud de la péninsule, nous reprenons la route du nord et quittons la côte pour passer par l’intérieur montagneux : adieu Océan ! Nous remontons une jolie et étroite vallée. Le long de la rivière, poussent quelques rizières quand le fond est assez large. Mais souvent la gorge se resserre et nous roulons à flanc de montagne. Nous descendons voir une cascade, plus loin des gens se baignent. Des échoppes vendent une grosse racine verte que nous supposons être du wasabi. Nous goûtons de drôles de sucreries, sortes de chips sucrées au wasabi.

Nous quittons à présent à la péninsule ainsi que le joli paysage. Aux abords de la ville de Mishima, nous retrouvons les zones industrielles présentes au Japon comme ailleurs. Notre but ce soir est d’arriver au mont Fuji ou plutôt sur l’un des lacs qui s’étendent au nord de la montagne. A 16h, nous sommes à celui Yamanaka mais, du mont, nous n’avons rien vu car la brume est tombée et il est invisible. Une nouvelle fois, nous baragouinons à l’office du tourisme et réussissons à nous faire indiquer une auberge. Comme la dernière fois, c’est un minshugu, il est tenu par un couple dont le mari parle un peu anglais. Nous n’avons pas le repas inclus ce qui fait d’ailleurs que c’est moins cher. L’auberge est plus simple que la nuit dernière : nous avons une chambre tatami sans salle de bain, mais il n’y a pas non plus de bel onsen, simplement une petite salle de bain à partager avec une douche et un petit bassin comme chez de nombreux japonais (on se douche toujours avant d’aller dans la baignoire). Cependant, on nous donne un bon de réduction pour le grand et luxueux onsen à cinq minutes de l’auberge. Nous allons avec joie profiter de tous ces bassins à diverses température et depuis lesquels on peut admirer le mont Fuji qui apparaît derrière la brume.

Le soir, nous mangeons dans un restaurant italien au bord du lac. La ville me fait penser à Gerardmer : même paysage montagneux avec un lac, même ambiance de petite station touristique familiale. Nous sommes les seuls touristes étrangers dans le restaurant qui n’a d’ailleurs même pas de carte en anglais !