Challenge Adpatations : La classe de neige

Je reviens au challenge de Happy Few avec, à nouveau, un roman d'Emmanuel Carrère. Il faut dire que j'apprécie beaucoup cet auteur et que beaucoup de ses livres ont été adaptés au cinéma.

La Classe de neige a longtemps fait partie à la fois des livres et des films qui manquaient cruellement à ma collection. J'ai acheté le roman d'occasion il y a peu de temps et à peine terminé, je me suis procuré le film pour voir l'adaptation !

Le roman fut à la hauteur de mes espérances. On y retrouve l'écriture tourmentée de Carrère qui sait donner vie au petit garçon que l'on suit. On est loin des clichés de l'enfance ou de la caricature. On ressent ses désirs, ses peurs, ses angoisses. L'univers de la classe de neige est très bien rendu, à la fois gai et inquiétant. De plus en plus inquiétant au fur et à mesure que l'intrigue avance. Et toujours, la présence du père, dominatrice et effrayante.

J'ai donc vu le film très peu de temps après ma lecture. Claude Miller a respecté presque à la lettre le roman de Carrère. Je me demandais comment les fantasmes et angoisses du jeune garçon seraient transmises à l'écran. Le réalisateur a su trouver une façon juste de les mettre en image sans que ça sonne faux ou déplacé. Les scènes de rêves sont particulièrement bien faites, elles semblent donner de la résonance au texte lui même. Tout le film est baigné d'une musique grinçante, presque désagréable, qui, dès le départ, instaure l'ambiance angoissante du roman en contraste avec l'image pourtant innocente d'enfants en vacances. Le personnage du père fut assez différent de ce que j'imaginais. Je voyais quelqu'un de plus froid et dur alors qu'il semble presque mielleux. Mais son ambiguïté est glaçante et l'angoisse qu'il fait naître chez son fils est palpable.

Les deux œuvres sont si proches (et je les ai lue et vue à si peu d'intervalle) que, dans ma mémoire, elle se fusionneront sans doute. Il me restera un souvenir global de cette intrigue racontée deux fois avec beaucoup de talent.

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Challenge adaptations : L'Adversaire

Toujours dans le cadre du challenge proposé par Happy Few, voilà une nouvelle critique d'un livre et de son adaptation. Je vais parler ici de L'Adversaire qui est à la fois un livre d'Emmanuel Carrère (2000) et un film de Nicole Garcia (2002).  J'ai d'abord vu le film avant de lire le livre et, pour une fois, je dois dire qu'il est difficile de choisir lequel est meilleur car les deux sont assez différents et ont leurs spécificités.

Je vais d'abord parler du film car c'est avec lui que j'ai découvert cette glaçante histoire. Car en effet, L'Adversaire est tirée de l'histoire vraie de Jean-Claude Roman qui fit croire pendant des années à sa famille qu'il était médecin avant de tuer femmes et enfants de peur que son secret ne soit découvert.

Dans le film, Jean-Claude Roman est magistralement interprété par Daniel Auteuil qui fait ressentir tout le mystère et toute la froideur du personnage. L'histoire est racontée sous forme de témoignages et flash-back nous rapprochant petit à petit de l'issue fatale mais jamais de l'explication, nous restons dans le doute et l'incompréhension. Je me souviens surtout des longs plans sur Jean-Claude Roman passant ses journées sur des aires de repos alors que sa femme le croit au travail.

Ces journées à ne rien faire, ou plutôt, ces journées où personne ne sut jamais ce qu'il faisait ont aussi beaucoup intrigué Emmanuel Carrère. L'élément principal, occulté du film, qui m'a surpris en lisant le livre est la présence voulue de l'auteur dans son récit. L'Adversaire d'Emmanuel Carrère ressemble plus à un témoignage qu'à un roman. On y découvre la rencontre entre l'auteur et son personnage, sa quête de compréhension, son enquête personnelle. On apprend beaucoup sur le passé de Jean-Claude Roman : comment il a pu "faire croire" qu'il était médecin, comment tout a dérapé le jour où il n'est pas allé à un examen. Mais apprendre n'est pas comprendre et on se perd, comme l'auteur, chez cet être insondable tiraillé entre l'horreur et la banalité.

En conclusion, c'est à la fois un très bon livre et un très bon film et on pourra profiter des deux sans redondances ni déceptions. Emmanuel Carrère a su nous entrainer dans son histoire, nous faire "ressentir" Jean-Claude Roman, nous placer devant l'incompréhension. Quant à Nicole Garcia, en s'inspirant du livre, elle a créé une œuvre à part entière. Traduisant par l'image les sentiments qui découlaient de la lecture, elle a retrouvé l'esprit de l'enquête par la forme du film sans pour autant ne réaliser qu'une pâle copie du livre. Deux œuvres différentes et complémentaires qui questionnent sur l'identité, le basculement, l'horreur et la vie.

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Challenge adaptations : Atonement / Expiations

J'ai décidé de participer au challenge proposé par Happy Few. C'est assez simple, il suffit d'écrire la critique d'un livre et son adaptation. En plus, c'est en plein dans le thème du prochain swap de livraddict.

J'ai choisi de parler du livre Expiation de Ian Mc Ewan, ou plutôt, Atonement comme je l'ai connu moi, en VO. En effet, j'ai lu ce livre en Irlande avec le book club, je n'avais aucune idée de ce dans quoi je me lançais. J'ai tout de suite apprécié. La première partie m'a particulièrement plu, elle se déroule en une seule journée mais prend la moitié du livre. Le style rend parfaitement la lenteur du temps qui passe sans pour autant être ennuyeux. C'est une journée très chaude dans l'Angleterre des années 30, tout semble innocent et pourtant on soupçonne qu'il va se passer quelque chose, que chaque détail restera gravé.

On a l'impression d'une journée qui n'en finit pas, qui s'étire à l'infini. En particulier car la narration n'est pas linéaire, elle prend le point de vue d'un personnage puis d'un autre, repars en arrière avant d'avancer pour de bon. La même scène est racontée sous plusieurs points de vues. Ces points de vue : celui de la petite fille au bord de l'adolescence, celui de la jeune femme, celui de l'amoureux, sont la clé de la claque qui va s'abattre sur les personnages. On découvre Briony et on apprécie Briony : inventive, pleine de vie. Et pourtant Briony, toute jeune qu'elle est, va commettre l'irréparable annoncé par les touches cruelles de l'auteur.

La seconde partie est aussi palpitante mais m'a tout de même moins touchée. On y découvre la débâcle des armées françaises et anglaises en 40 et, bien sûr, les conséquences de la première partie. Elle est très différente de la première. Le rythme change, on revient à une narration plus classique mais elle complète bien le livre et la fin étrange sous forme de mise en abime nous questionne et nous laisse libres.

J'ai aussi vu le film qui a été tiré du livre. Contrairement à certains, j'aime voir les adaptations des livres que j'ai lus et appréciés. Je n'ai pas peur que le livre me soit gâché par le film, au contraire ! En voyant le film, je retrouve les sentiments qui m'ont traversés pendant la lecture et le plaisir est entier. Bien sûr, il arrive aussi que je n'apprécie pas le film, mais j'ai tout de même tendance à être plus clémente dans mon jugement. C'est ce qui s'est passé pour Atonement. Objectivement, le film n'est pas à la hauteur du livre. Keira Knightley fait une bonne Cecilia mais l'originalité du style, la force de l'écriture n'est pas rendue. Les gens autour de moi qui l'ont vu (sans l'avoir lu) l'ont trouvé au pire ennuyeux et au mieux agréable mais oubliable. Oui, l'histoire d'amour est attirante, oui, les scènes de guerre sont bien faîtes mais il manque quelque chose, cette petite palpitation qui donne envie de le voir jusqu'au bout. Moi, je n'ai pas pu m'empêcher d'apprécier, de retrouver le plaisir et les émotions de ma lecture. Peut-être que j'avais juste envie de revivre le livre avec cette pleine satisfaction de "savoir" ce qui va se passer. Bon je dois tout de même avouer que la scène de la bibliothèque (comprenne qui a lu) m'a plus fait vibrer lors de la lecture que lors du visionage car, tout de même, la force subjective de l'écriture reste beaucoup puissante que celle de l'image.

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