Ce week-end, nous faisons ce que nous n'avons pas encore vraiment eu l'occasion de faire : les touristes ! Première destination : Asakusa. C'est dans ce quartier que l'on trouve ce qu'il reste du "vieux" Tokyo, car entre les tremblements de terre, les incendies, les bombardements de 1945, la ville est pratiquement entièrement récente. Quand on descend à la station cependant, rien ne saute aux yeux, nous sommes toujours au milieu de ces grandes rues avec de hauts immeubles inesthétiques, mais en tournant la tête, voilà qu’apparaît la magnifique porte du quartier sous laquelle se presse une foule dense. De l'autre côté, ce sont des maisons basses dans un style plus anciens (même si en fait, peu sont réellement anciennes) et surtout des tas de petites boutiques de souvenirs divers et une affluence digne de la Tour Eiffel. Nous quittons la rue principale, bondée, pour profiter du reste du quartier plus agréable. C'est là que nous trouvons un restaurant pour ce midi.

Nous choisissons, exceptionnellement un restaurant de suchis. Pourquoi aller là alors que je n'aime pas le poisson ? Déjà, je ne voudrais pas priver Seb et puis, c'est tout de même typiquement l'expérience à faire quand on est au Japon. Les cuisiniers sont au centre de la pièce et déposent les petits plats sur un tapis roulant autour duquel les clients sont assis. Chacun se sert comme il veut sur le tapis. La couleur des assiettes correspond au prix des plats et on garde donc toutes ses assiettes vides pour que le serveur puisse à la fin du repas nous apporter l'addition. En fait, un code magnétique est incrusté sous l'assiette et le serveur n'a qu'à passer son appareil à côté de la pile pour qu'immédiatement l'addition se fasse toute seule ! Sur un autre tapis roulant en dessous du tapis principal, on peut attraper de petites tasses, qu'on remplit alors du thé vert en poudre "macha" disponible sur notre table et de l'eau chaude qui nous arrive directement par un robinet. Voilà donc une première chose dont je peux me nourrir : le thé vert à volonté. Pour le reste, au moins, je peux voir les plats et en conclure que je ne peux pas les manger. Le seul qui est à mon goût est le "tamago", c'est à dire de l'omelette. En regardant la carte, je commande au chef le seul autre plat qui me convient : "Inari" qui se compose uniquement de riz et de tofu. Il y aurait bien aussi tous les petits rouleaux au concombre mais mon  intolérance aux fruits de mer s'étend aussi aux algues.

Après ce frugal repas, nous reprenons notre visite du quartier. Nous allons voir son principal attrait : le temple qui est en son centre et qui attire autant les japonais que les touristes. La rue principale, si pleine de monde, mène directement à l'entrée du temple. Là, une immense file de japonais se forme depuis la cabane à encens jusqu'à l'autel pour que chacun puisse aller faire sa prière. Le temple lui même est assez joli, il a été reconstruit après la guerre à l'identique, il est décoré de peintures chatoyantes et de dorures. Autour du temple principal, d'autres temples plus petits ainsi que des statues de Bouddha.  Nous marchons encore un peu dans le quartier mais il souffre un peu trop du syndrome "Mont Saint-Michel" (lieu intéressant rendu artificiel par un trop grand nombre de touristes) pour que nous ayons envie d'y rester.

Nous reprenons donc le métro pour aller à la station voisine de Ueno. C'est que j'étais la veille, mais cette fois, plutôt que de visiter le parc, nous allons au musée national de Tokyo. Il est dans un grand et beau bâtiment au milieu du parc et expose l'art japonais de l'antiquité jusqu'au XIXème siècle. Il y a aussi beaucoup d'artisanat mais nous avons du mal à nous extasier devant des assiettes, même très anciennes. Les estampes par contre et les sculptures attirent notre attention. Le musée est très bien fait, il y a beaucoup d'explications. Les sculptures religieuses sont très intéressantes, elles représentent des personnages aux visages souvent abracadabrants. De nombreuses estampes sont liées au bouddhisme mais on en trouve aussi dans l'art populaire, liées au monde du spectacle. On peut y voir alors, par exemple, les comédiennes enfilant leur costume ou d'autres scènes de ce genre. C'est ces dernières que j'ai particulièrement appréciées. Je découvre aussi une petite exposition temporaire sur les femmes artistes au Japon souvent oubliées par l'histoire, étant "femme de" ou "fille de". L'une d'elle a retenu mon attention par son destin étonnant : après avoir étudié l'art japonais, Kiyohara Tama a épousé un artiste italien à la fin du XIXème siècle et a vécu à Palerme où elle a produit des peintures de type occidentale, comme les peintures murales de la Villa Caruso Valenti.

Nous avons beaucoup marché, et nous écroulons épuisés sur les bancs du parc du musée. Le soir tombe sur le parc Ueno, devant nous une jolie fontaine bruisse doucement. Nous cherchons où aller ce soir. Finalement, nous décidons de rester dans les alentours et d'aller explorer Yanaka juste au nord du parc. Ce petit  quartier semble assez méconnu. Nous y croisons peu de touristes et marchons seuls dans la lumière du crépuscule. Il est fait de maisons basses de style ancien, particulièrement mignonnes pour Tokyo. Derrière les murets, se cachent de jolis petits temples. Il y a de petites boutiques et des cafés attrayants. Difficile cependant de trouver un restaurant. Celui dans lequel nous mangeons est très simple. La dame qui le tient ne parle pas un mot d'anglais mais a trouvé au fin fond d'un tiroir un menu traduit. Nous lui donnons les numéros des plats et elle fait la correspondance avec son menu en japonais.

Le dimanche, nous partons à l'assaut du quartier Ginza. C'est l'endroit le plus chic de Tokyo. Le long de la grande avenue rendue piétonne le dimanche se succèdent les façades contemporaines et les architectures étonnantes. On trouve toutes les boutiques de luxe internationale : Prada, Tiphany's, Cartier, Vuiton, ... Certaines boutiques sont plus abordables comme le japonais Uniqulo où Sébastien s'achète d'ailleurs quelques vêtements. Nous trouvons dans une rue adjacente un restaurant étonnement peu cher pour le quartier  qui sert essentiellement deux plats : un curry indien ou des pâtes italiennes. Je dois dire que je ne suis pas vraiment accoutumée à la nourriture locale et je trouve les pâtes absolument délicieuses !

Pour finir notre après-midi, nous repartons de l'autre côté de Tokyo dans le quartier de Shinjuku. Sébastien a eu l'occasion de s'y rendre pour ses rendez-vous mais moi, je n'en ai vu que la gare. Pour ceux qui ont peur de certains aspects du Japon : la foule, l'immensité de la ville, la multitudes de signes incompréhensibles, Shijuku peut certainement ressembler à l'enfer. La gare elle-même est un immense carrefour où l'on se perd très facilement, elle possède des dizaines de sorties et de lignes différentes. A l'extérieur, nous cherchons vainement le magasin "Don Quijote" dont tout le monde nous a parlé. Nous errons à travers les rues et nous retrouvons dans le quartier coréen que nous reconnaissons immédiatement car nous pouvons lire ce qui est écrit. Nous n'avons pas trouvé notre boutique et revenons vers la gare. Le quartier est grouillant d'une foule animée et bruyante (ne pas croire que les japonais sont silencieux, devant chaque boutique un(e) gentil(lle) vendeur(euse) crie d'une voix suraiguë des choses incompréhensibles). Les murs sont comme des mosaïques multicolores et illuminées de tous leurs néons clignotants.  Nous croisons des jeunes hommes en costumes noirs et coupes de cheveux ahurissantes. Ce sont des "male host". A Shinjuku, hommes et femmes peuvent louer les services de jeunes personnes pour les accompagner en soirée. Parfois, c'est directement de la prostitution mais pas toujours : on trouve tous les degrés en terme de pratique ainsi que les choses les plus étranges.

Nous avons marché toute la journée et sommes épuisés. Tokyo est une ville particulièrement fatigante et aussi, assez angoissante. Pendant ces quelques jours, j'ai eu l'impression d'apprendre à la connaître un peu mieux mais elle me paraît surtout de plus en plus insaisissable comme une folie collective, un mouvement perpétuel dont je ne saisis pas le sens. Pour notre dernier soir, nous dînons avec nos amis en partageant le fromage que nous leur avons rapporté de France. Puis nous sortons chanter au karaoke, habitude japonaise qui, elle, me séduit beaucoup !

Demain, nous partons en voiture de location  travers le pays. Encore d'autres surprises nous y attendent. En attendant, j'ai recopié soigneusement en japonais et appris par coeur la phrase "je suis allergique au poisson et aux fruits de mer", j'espère que ça fonctionnera...